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L’employeur peut être responsable même quand le harcèlement sexuel n’est pas établi

L’employeur peut être responsable d’un manquement à son obligation de sécurité quand bien même le harcèlement sexuel n’est pas établi.

Cass. Soc. 8 juillet 2020, n°18-24.320

 

Notre commentaire :

 

  • Une salariée qui estimait avoir subi des actes de harcèlement sexuel de la part d’un collègue de travail sollicitait de son employeur :
  • à la fois des dommages et intérêts pour le préjudice de harcèlement sexuel,
  • ainsi que des dommages et intérêts distincts pour manquement à l’obligation de sécurité.

La cour d’appel, ayant considéré que les faits invoqués par la salariée ne permettaient pas de conclure à l’existence d’un harcèlement sexuel, en avait immédiatement déduit qu’il n’y avait pas lieu d’examiner un éventuel manquement de l’employeur à son obligation de sécurité.

  • La Cour de cassation, tout en réaffirmant l’appréciation souveraine des juges du fond en matière de harcèlement, censure la cour d’appel en ce qu’elle a refusé de vérifier si l’employeur avait malgré tout respecté son obligation de prévention des risques professionnels.

Ainsi, comme elle l’avait déjà fait en matière de harcèlement moral[1], la Cour de cassation retient l’existence de deux fondements juridiques distincts, devant être examinés séparément :

« L’obligation de prévention des risques professionnels (…) est distincte de la prohibition des agissements de harcèlement moral instituée par l’article L.1152-1 du code du travail et des agissements de harcèlement sexuel instituée par l’article L.1153-1 du même code et ne se confond pas avec elle. »

Autrement dit, l’absence de harcèlement sexuel -ou moral- n’exclut pas la faute de prévention de l’employeur et inversement, l’existence d’un harcèlement ne permettra d’engager la responsabilité de l’employeur que s’il a commis une faute de prévention.

  • Cette solution est assez logique dans la mesure ou l’inverse permettrait de légitimer, après coup, le comportement d’un employeur resté passif face à un risque de harcèlement moral ou sexuel.

En tout état de cause, cet arrêt est l’occasion de réaffirmer la prudence nécessaire en matière de harcèlement au travail : dès la moindre situation potentielle de harcèlement, l’employeur doit absolument réagir et mettre en œuvre toutes les mesures de prévention qui s’imposent.

[1] Cass. Soc. 12 avril 2018, n°16-29.072 ; Cass. Soc. 27 novembre 2019, n°18-10.551