Publications

En l’absence dans le règlement intérieur de clause de neutralité, l’interdiction faite à une salariée de porter un foulard islamique caractérise une discrimination fondée sur les convictions religieuses

Dans cette affaire, une salariée a fait l’objet d’un licenciement en raison de son refus de retirer son foulard islamique lorsqu’elle était en contact avec la clientèle.

Aucune clause de neutralité interdisant le port visible de tout signe politique, philosophique ou religieux sur le lieu de travail n’était toutefois prévue dans le règlement intérieur de l’entreprise.

Dans cet arrêt du 14 avril 2021 (n°19-24.079), la Cour de cassation rappelle :

  • Que l’employeur peut prévoir dans le règlement intérieur de l’entreprise une clause de neutralité interdisant le port visible de tout signe politique, philosophique ou religieux sur le lieu de travail, dès lors que cette clause générale et indifférenciée n’est appliquée qu’aux salariés se trouvant en contact avec les clients,
  • Qu’il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE, 14 mars 2017, aff. C-188/15, Micropole Univers) que la notion d’« exigence professionnelle essentielle et déterminante », au sens de l’article 4, § 1 de la directive 2000/78 du 27 novembre 2000, renvoie à une exigence objectivement dictée par la nature ou les conditions d’exercice de l’activité professionnelle en cause. Elle ne saurait, en revanche, couvrir des considérations subjectives, telles que la volonté de l’employeur de tenir compte des souhaits particuliers du client.

De sorte qu’en l’absence d’une telle clause de neutralité, l’interdiction de porter un foulard islamique caractérise l’existence d’une discrimination directement fondée sur les convictions religieuses.

Interdiction qui ne saurait être justifiée par la politique commerciale de l’entreprise, l’attente alléguée des clients sur l’apparence physique des vendeuses d’un commerce de détail d’habillement ne constituant pas une exigence professionnelle essentielle et déterminante, au sens de l’article 4 § 1 de la directive n° 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000, tel qu’interprété par la Cour de justice de l’Union européenne.

Ainsi, en résumé, l’employeur peut prévoir dans le règlement intérieur de l’entreprise une clause de neutralité interdisant le port visible de tout signe politique, philosophique ou religieux sur le lieu de travail, à condition qu’elle soit générale et indifférenciée et qu’elle soit appliquée uniquement aux salariés en contact avec la clientèle.

A défaut d’une telle clause, l’interdiction faite à un salarié en contact avec la clientèle de porter un signe religieux constitue une discrimination fondée sur les convictions religieuses, qui ne saurait être justifiée par la politique commerciale de l’entreprise.