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Activité pendant un arrêt de travail et déloyauté

Cass. soc., 1er février 2023, n°21-20.526

Par un arrêt du 1er février 2023, la Cour de cassation précise les contours de l’obligation de loyauté pesant sur le salarié lorsque son contrat de travail est suspendu pour cause de maladie.

Le salarié qui exerce pendant son arrêt de travail une activité incompatible avec son incapacité de travail ne manque pas à son obligation de loyauté, sauf à causer un préjudice à l’employeur

Notre commentaire :

  • Sur plus d’une année, un salarié de la RATP va être arrêté à de multiples reprises pour différents types de blessures (118 jours à la suite d’une blessure au coude, 36 jours pour blessures au cou et au poignet, 29 jours pour blessures au bras droit).

L’employeur va toutefois découvrir que, pendant ces différents arrêts, le salarié a participé à 14 compétitions de badminton, et que par conséquent la Caisse des Assurances Sociales de la RATP a invalidé ces périodes d’arrêts de travail.

L’employeur va donc licencier le salarié pour faute grave, en se fondant sur un manquement de ce dernier à son obligation de loyauté.

  • Le salarié conteste son licenciement et le juge d’appel lui donne raison, en considérant qu’il n’est pas démontré que la participation du salarié à des compétitions de badminton pendant ses arrêts de travail aurait aggravé son état de santé ou prolongé ses arrêts de travail, de sorte qu’aucun préjudice n’a été causé à l’employeur et que le manquement du salarié à son obligation de loyauté n’est donc pas caractérisé.
  • L’employeur se pourvoit en cassation en avançant notamment comme argument que la participation du salarié à des activités manifestement incompatibles avec son incapacité de travail cause un préjudice économique et financier à l’employeur qui assure par lui-même la couverture des risques maladie de son personnel dans le cadre d’un régime spécial de sécurité sociale
  • La Cour de cassation valide cependant la décision du juge d’appel :
  • D’une part, en rappelant que l’exercice d’une activité pendant un arrêt de travail ne constitue pas en soi un manquement à l’obligation de loyauté du salarié et qu’il est nécessaire que l’acte commis par le salarié durant son arrêt de travail cause un préjudice à l’employeur pour que le licenciement soit justifié ;
    • D’autre part, en précisant qu’un tel préjudice ne saurait résulter du seul maintien intégral du salaire par l’employeur pendant l’arrêt de travail.

La solution de la Cour de cassation semble particulièrement dure et opaque. Outre qu’elle subordonne la validité du licenciement à la démonstration par l’employeur du préjudice qu’il a subi, l’appréciation de ce préjudice est sévèrement contrôlée par la Cour de cassation : le fait que l’employeur ait intégralement maintenu le salaire du salarié pendant différents arrêts de travail au cours desquels le salarié a pourtant entretenu une activité sportive incompatible avec son incapacité de travail – de sorte que ses arrêts ont été invalidés par la Caisse – ne suffit pas à démontrer le préjudice de l’employeur.

De nécessaires précisions devront être apportées à l’avenir par la Haute Juridiction pour déterminer les circonstances de faits permettant de justifier le préjudice de l’employeur dans un tel contexte.